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Retrouver le fil rouge de l’humanité

Expulsions massives et systématiques vers un pays sûr, la Turquie, où ils sont regroupés, concentrés disait-on avant, au bon gré du pays d’accueil.

Voici le nouveau visage de notre Europe confrontée par ailleurs aux extrémismes populistes et aux fanatismes religieux.

Et dans notre pays, la France, pays des droits de l’homme, terre d’asile des damnés de la terre, un silence de plomb.

Que penser, que dire qui ne soit pas excessif ni injuste.

Peut être en reprenant d’abord, comme le fait tout bon juriste, les faits et le droit.

Les faits sont connus: les guerres dans l’extrême et le Moyen Orient (Afghanistan, Irak, Syrie, Libye), dans lesquelles l’Occident et la France, ont pris part, ont contraint des populations entières à fuir leur pays, les conflits d’aujourd’hui faisant des civils les toutes premières victimes.

Ces réfugiés cherchent à rejoindre des pays où leur vie, leur intégrité physique et leur liberté ne soient plus menacées et où ils puissent vivre dignement.

Certains, les plus nombreux, ont trouvé refuge dans des pays limitrophes ou proches: Iran, Liban, Jordanie, Turquie.

D’autres cherchent à aller plus loin et à rejoindre l’Europe.

Comment ne pas se remémorer les images de ces files de personnes fuyant l’avancée des armées allemandes pour se réfugier dans le sud de la France et pour certaines traverser l’Atlantique, ou encore celles franchissant les Pyrénées pour échapper au troupes franquistes?

N’y pensons pas, tout cela n’est que de l’histoire ancienne, même si nombre d’entre nous sont les descendants de ces migrants d’alors.

La simple décence, la mémoire n’ont plus cours lorsqu’il s’agit de satisfaire son besoin de confort et de conjurer ses craintes,

A ce jour le nombre de réfugiés Syriens est aux alentours de 5 millions de personnes dont 2,5 millions en Turquie, 1 million au Liban, 650.000 en Jordanie, pour environ 800.000 en Europe.

Quel est le droit applicable aux réfugiés ?

Il résulte de la conjonction de textes nationaux et internationaux.

Tout d’abord il convient de rappeler que les étrangers se trouvant sur notre territoire bénéficient des droits et libertés énumérés dans notre Constitution et la Déclaration des Droits de l’Homme qui y est annexée.

Ces droits fondamentaux sont attachés à tout être humain et ne dépendent donc pas de sa nationalité ou de la régularité de sa situation administrative sur un territoire national.

Ensuite le traité international concernant les réfugiés, la Convention de Genève du 28 juillet 1951, oblige les États qui l’ont ratifié, dont la France et les États Européens, à accueillir les personnes qui craignent avec raison d’être persécutés du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité de leur appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques.

Enfin ce traité, comme la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne et la Convention Européenne des Droits de l’Homme interdisent notamment les expulsions collectives.

Dés lors toute personne entrant sur notre territoire doit voir ses droits fondamentaux respectés et bénéficier de conditions de vie décentes dans l’attente de l’examen de sa demande d’asile.

Ce qui n’exclut évidemment pas un contrôle de son identité afin de s’assurer qu’il ne cherche pas à pénétrer dans notre pays pour d’autres raisons que sécuritaires.

Ce sont ces grands textes qui sont applicables à ces millions d’êtres humains qui fuient l’enfer qu’est devenu leur pays; et aujourd’hui, grâce à l’abondance des moyens d’information, nul ne peut ignorer ce qui se passe dans le monde.

Et surtout ne doutons pas un instant du drame personnel que constitue toujours l’exil et qui ne fait que s’ajouter aux horreurs vécues sous la terreur et les bombes.

Face à cet afflux massif de réfugiés les États Européens ont répondu dans la cacophonie d’où ressortent les plus sombres messages de la xénophobie et de l’indifférence.
Rejetons ces intrus avec lesquels nous ne partageons ni la race ni la religion, du moins pour la plupart; ce sont des envahisseurs contre lesquels nous avons le devoir de nous défendre; et les gouvernants, bruts protecteurs de leur peuple, de jouer sur ces peurs pour renforcer leur assise populaire et conforter leur pouvoir.

Comme nous aurions été fiers de notre pays s’il s’était levé le premier, avec force et détermination, pour proclamer le devoir suprême d’humanité autant que le respect des textes qui nous engagent et nous lient, écrits , décidés ou souvent inspirés par la France.

Au lieu de cela ce fut un pâle exercice comptable; et c’est à l’Allemagne d’Angela Merckel que l’Europe a dû le salut de son âme; aussitôt tancée par un Premier Ministre Francais, Socialiste de surcroît!

Mais sont ce des propos irréalistes d’éternels droits de l’hommistes toujours prompts à sacrifier le bien être de leurs compatriotes pour satisfaire de vagues principes surannés?

Non, bien au contraire! Car en abandonnant en rase campagne les valeurs et principes de notre République, qui sont également ceux de l’Europe, nous abattons le dernier rempart contre les idées extrémistes qui incendièrent par le passé l’Europe et aujourd’hui, conjuguées aux dangers du fanatisme religieux, risquent de faire de notre Continent un lieu d’affrontement entre barbaries.

En agissant ainsi, c’est à dire en acceptant sinon en propageant la xénophobie, en reculant sur les libertés individuelles et collectives au motif de protéger nos populations nous sapons les fondements de nos démocraties qui finiront par tomber comme des fruits mûrs entre les mains de démagogues qui les réduiront à la célébration du chef et de la nation qu’il dirige; d’où la proximité fascinée des extrêmes droites, dont notre Front National, pour la Russie de Vladimir Poutine.

Ne comprenons nous pas que c’est ce que cherchent nos ennemis parce que ces valeurs et principes de liberté, de fraternité, d’égalité, de laïcité constituent des menaces directes et fatales pour leur influence et leur pouvoir?

Ne voyons nous pas qu’ils nous livrent une véritable guerre révolutionnaire, au sens Léniniste du terme, en attisant nos contradictions pour nous amener à renoncer à notre socle de valeurs et donc à supprimer notre capacité de résistance?

Nous avons en France les premières preuves de ce phénomène avec le basculement d’une partie de la gauche vers la droite qui elle même a adopté les thèses de l’extrême droite au seul bénéfice idéologique et électoral du Front National; les propos sur les Roms, la déchéance de nationalité et le rejet des migrants étant à juste titre perçus par les citoyens comme l’apanage du catalogue politique de l’extrême droite, ils préfèrent l’original aux copies.

Alors la faiblesse, aujourd’hui, n’est pas du côté de ceux qui défendent ces valeurs et principes.

La victoire aujourd’hui idéologique, demain électorale, des extrémismes n’est pas une fatalité.

Remettons sur le devant de la scène cette valeur de fraternité qui n’est pas à la remorque de celles de liberté et d’égalité mais qui leur donne toute la dimension humaine.

Quels seraient ces deux principes s’il n’y avait entre les hommes qu’indifférence? La valeur de fraternité c’est elle qui relie les hommes et construit l’harmonie dans la société; elle est présente dans toutes les civilisations et dans toutes les religions qui obligent les fidèles au secours de l’autre ou à la charité.

C’est ainsi que le droit d’asile s’est inscrit dans l’histoire avant même l’avènement des régimes démocratiques et de notre République; il constitue le fil rouge de l’humanité.

C’est ce que vient de rappeler avec éclat le Pape Francois en visite à Lesbos.

Alors relevons ce défit avec les seules armes qui vaillent: celles de la fraternité et de la solidarité, les seules qui nous préservent de la barbarie qui est à nos portes: les seules qui puissent revivifier et fédérer notre corps social; le danger ce ne sont pas les migrants mais ceux qui les rejettent.